L’intérêt scientifique du projet 24 heures d’information radiophonique réside dans le travail de terrain mené sur un corpus fermé dans son exhaustivité (toute l’information radiophonique d’une journée ordinaire).
Ce projet, en cohérence avec le parcours recherche du nouveau master DiMIP (Discours institutionnels, médiatiques et politiques), porté par l’équipe Praxiling, se donne pour tâche de proposer une modélisation des pratiques interactionnelles dans les médias en les circonscrivant aux journaux parlés, bulletins, et débats liés à l’information, à partir d’une analyse linguistique basée sur la méthodologie de l’analyse du discours et des interactions fondée sur une approche multimodale. Le premier volet de l’analyse (2010-2011) porte sur l’alternance entre discours rapportés et citations enregistrées, l’étude de la coénonciation et des formes audibles de connivence avec les auditeurs, et l’analyse des dysfonctionnements interactionnels. Une illustration des résultats possibles est fournie par la confrontation des deux extraits audio (fichiers Amélie 1 et Amélie 2) et du fichier texte (Amélie 3).

Publications :

Verine B., 2007d[2009], « Usons de la dimension vocale jusqu’à la corde : la voix du locuteur enchâssé dans le discours rapporté direct à l’oral », Cahiers de praxématique 49, p. 159-181.

Transcriptions :

[1] (Deux jeunes viennent de mourir électrocutés en tentant d’échapper à une interpellation policière.)

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(L1) Nicolas Sarkozy[1] qui promet que tout(e) la lumièr(e) s(e)ra fait(e) sur cette affair(e) / qui dit vouloir s’attaquer / aux violenc(e)s urbain(e)s en décrétant la toléranc(e) zéro / et en annonçant qu’il ira / chaqu(e) semain(e) dans un quartier difficile / il était à nouveau c(e) matin en Sein(e)-Saint-Denis

(l1) Clichy-sous-Bois / on a eu d’abord ce drame avec ces deux jeun(e)s / c’est un drame / (malheureus(e)ment pour les parents) et / je reçois les parents cet après-midi (hmhm) (haha) / j(e) les reçois pour les assurer d’une chos(e) dans / l’épreuv(e) qui est la leur / c’est qu’ils auront accès à tous les documents pour savoir quelle est exactement la vérité / premier point / deuxièm(e) point / j’ai mis les moyens nécessair(e)s à Clichy-sous-Bois / pour que vous puissiez vivr(e) tranquill(e)ment / ya aucun(e) raison qu(e) Clichy-sous-Bois connaiss(e) des nuits d’émeute / comm(e) cela / troisièm(e)ment je vais voir dans un instant l’imam / pour parler avec lui d(e) c(e) qui s’est passé / dans la mosquée de manière à c(e) que le calme revienne / parc(e) qu’on n(e) peut rien traiter et rien fair(e) quand ya pas du calme / en l’état de me::s informations / je confirm(e) que c’est bien un(e) grenad(e) lacrymogène euh qui vient d’une:: / -fin / qui est en dotation / dans euh les compagnies euh d’intervention qui étaient / sur place en Sein(e)-Saint-D(e)nis cett(e) nuit-là ce qui n(e) veut pas dir(e) / que c’est un tir qui a été vou- euh / fait par un policier hein ça c’est l’enquêt(e) qui le dira

(L1) Nicolas Sarkozy au micro de: Sophie Parmentier vous l’avez entendu c’est donc bien / un(e) grenad(e) lacrymogèn(e) qui a été euh tirée dans la mosquée (« Le 13-14 » d’Yves Decamp, France Inter, 31 octobre 2005).

 

[2] (Alain Sérane est en train de répondre à la question : si je te demandai:s le souvenir le plus pénible de ces treize mois le le plus mauvais.)

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ça: bon euh c’(é)tait pénible / pénible: / eu:h / d’une part psychologiquement pasqu’yavait d’autre:s euh travailleurs yavait d’autres mineurs / aors chacun son niveau / e::t / dans ma tête je disais euh / (3) fan des purges (3) les les autres qui sont pasqu’on pouvait pas tellement parler entre nous / (3) je disais fan des purges là les autres qui sont à côté de nous là i(l)s vont euh (3) / yen a que ça va les leur foutre un (2) coup (2) au moral (Ladrecht[2], Sérane II, 65A).

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[3] c’est là où le discours de vérité / euh qui qui est nécessair(e) doit être prononcé et / si grand(e) que soit mon admiration pour Raymond Barr(e) je crois qu’i(l) n(e) suffit pas / de dir(e) (4) oui oui oui / i(l) faut dir(e) la vérité (4) aux Français / ça n(e) suffit pas car la vérité tell(e) qu’elle est entendue ainsi c’est simplement / l’idée euh Français vous allez en baver (4) d’ailleurs je n(e) suis pas là pour fair(e) plaisir (4) aux gens bon / et on a eu (i(l) faut r(e)tenir son bilan) on a eu c(e) discours qui est très sympathiqu(e) pasque ya ya quand mêm(e) un(e) un(e) un(e) un(e) fraîcheur dans l(e) discours d(e) Raymond Barr(e) que nous d(e)vons saluer (Jean-Louis Bourlanges, « L’esprit public », France Culture, 2 avril 2006).

[4] (Pendant les vacances, A et B sont partis en excursion, tandis que C et D restaient à la maison avec leurs enfants patraques. Le soir, Marianne, notée C, narre sa journée en présence de Lambert, noté D. On entend en fond des éclats de voix d’enfants et/ou de télévision. Pour la commodité de l’analyse, je détache du tour de parole 21, les huit DD sous-numérotés [4a] à [4h].)

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19C – (+++) (1) alors j(e) te finis notre disput(e) (rire) c’est intéressant (1) (++)

20D – ça intéress(e) peut-êtr(e) pas tout l(e) monde hein (rire B, C et D)

21C – si c’est toujours marrant d(e) voir la merd(e) chez les autres (rire A, B et C) // et donc euh / (vous voulez quelque chose non­ +++ D) (1) on a mangé tristement une assiett(e) de riz (rire C) et puis (1) /

[4a] je dis à Lambert écout(e) vraiment ça je je / je me sens pas bien / je vais aller faire un(e) siest(e) réveill(e)-moi dans un(e) demi-heure / euh j(e) vais aller m’allonger un peu // et euh j(e) f(e)rai la vaissell(e) j(e l)ui dis j(e) f(e)rai la vaissell(e) je f(e)rai la vaissell(e) mais réveill(e)-moi dans un(e) demi-heure / et j’émerge d’un sommeil / pégueux[3] lourd atroc(e) tu vois d’un seul coup en entendant l(e) bruit du chauffe-eau / j(e) me précipite à la cuisine

[4b] en disant mais non mais je je non non mais laiss(e) je vais la fair(e) la vaissell(e) /

[4c] (4) bien je m’ennuyais tell(e)ment / que j’avais plus que ça à faire (4) / euh /

[4d] (4) ah bon mais euh pasque mais (4) (yavait pas de film à la télé A) il est tard­ mais il est tard alors­ c’est pasque /

[4e] (4) il est six heur(e)s je pense (4) /

[4f] (4) mais / mais je / mais qu’est-c(e) que (4) / (rire A) mais vous avez fait quoi / et les enfants ont fait quoi­ /

[4g] (4) i(l)s ont regardé tout(e) la la télé tout(e) l’après-midi (4) / et alors là j’ai explosé

[4h] en disant (2) merd(e) (2) mais j(e) t’avais dit d(e) me réveiller (+++ D) c’est pas la pein(e) de m(e) fair(e) des reproches (rire A et B) (Conil[4] 12, 19-21).

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[5] (1) alors j(e) me suis installée dans l(e) bus / j’ai croisé mes p(e)tits bras j’ai fait la moue et ça a duré comm(e) ça trois heures / et alors (1) ya la copin(e) qui v(e)nait euh / ça va t’as pas mal au cœur­ (4) non non ça va non non non (4) / (1) ça m’a trop fait chier chier chier chier (1) / (Conil 5, 1C).

[6] (Alain Sérane narre une algarade entre Georges Recani, mineur gréviste, et un notable socialiste.)

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alors il a commencé à lui dire: // eu:h / ah tou veux nous touer toi / espèce de: je sais pas qu’est-c(e) qu’i(l) lui a dit (Ladrecht, Sérane I, 1, 6A).

[7] (Dans une location d’été, Marianne, notée C, commente une visite de la propriétaire qui, au vu de son embonpoint abdominal, a cru qu’elle était enceinte. Lors d’une précédente visite, la bailleresse s’était permis des remarques sur l’entretien de la maison.)

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1D – mais elle a rien dit cett(e) fois-ci­

2C – non / sauf que j’étais enceinte ha salope

3A – mais elle a p(eu)t-êtr(e) pensé beaucoup / elle a p(eu)t-êtr(e) beaucoup pensé

4C – évidemment

5D – boh moi ell(e) peut penser c(e) qu’ell(e) veut -fin

4C – évidemment dans ton état tu peux pas (1) beaucoup nettoyer la terrasse (1) (rire C et B)

6B – alors là en fait c’était pour tester pourquoi vous fait(e)s rien le ménag(e) là c’est (1) ça manqu(e) ça (1) / (Conil 4).

 

 



[1] Alors ministre de l’intérieur.

[2] Interviews recueillies dans le bassin minier d’Alès par Jacques Bres et Françoise Madray de 1982 à 1984.

[3] Poisseux en français méridional.

[4] Échanges familiers que j’ai enregistrés à micro caché en 1998.